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Directions RH et RSE : je t’aime moi non plus

By:
Eric Alonso
Directions RH et RSE : je t’aime moi non plus

Au sortir de la plupart des comités exécutifs d’entreprises du CAC 40 de ces six derniers mois, le constat est le même : la direction du développement durable, sous les feux de l’actualité a fait de nombreuses propositions pour travailler l’image « green » de la compagnie, soutenue par le Marketing et le Commercial, la Direction Financière se demandant toutefois comment financer ces actions, tandis que la DRH pointe la nécessité de s’occuper également du côté social, des salaires et du recrutement devenu complexe. Quant à la direction générale, elle hésite, de crainte d’être visée par des accusations de greenwashing par les influenceurs du climat, très réactifs depuis quelques mois. Cette vision, certes un peu réductrice, témoigne pourtant du fonctionnement de deux directions qui n’ont jamais considéré faire le même métier, avec une fonction RSE / développement durable / sustainability centrée sur l’environnement, et une fonction RH s’attribuant le social et l’humain (davantage que le sociétal), en le limitant souvent à l’interne.

Des actions non intégrées

Pourtant les politiques RH et RSE gagneraient largement en efficacité si elles étaient menées de concert.

  • Voici une série d’exemples possibles de coopération :
  • Valoriser les actions RSE lors des évaluations annuelles des collaborateurs, et inclure les compétences RSE dans la sélection des hauts potentiels,
  • Intégrer dans les plans de formation, managériale notamment, des parcours liés à l’environnement, en les liant aux pratiques quotidiennes et de pilotage,
  • Ajouter dans les applications de suivi des frais professionnels des éléments liés à la production carbone,
  • Choisir, (RH et RSE ensemble), des actions environnementales compréhensibles et engageantes pour les collaborateurs, et rendre crédible le discours RSE auprès de ces derniers : les derniers baromètres internes incluant une question sur la politique environnementale de l’entreprise montrent pour la majorité une perception négative des actions menées, considérées comme un argument Marketing plus que comme un positionnement renouvelé de la direction, un comble en interne !
  • Développer l’exemplarité des dirigeants en matière sociale et environnementale et développer une véritable culture autour du rôle de l’entreprise dans la construction d’un futur positif,
  • Permettre à chaque salarié d’agir à son niveau au cœur de la société, par des dispositifs de mécénat, de contribution au projet d’associations, par des actions annuelles… sans en faire uniquement une occasion de communiquer,
  • Coconstruire une Marque Employeur montrant l’intégration, et non la juxtaposition, des dimensions sociales et environnementales, misant sur l’authenticité des discours,
  • Sensibiliser les représentants du personnel à la dimension sociétale, à la solidarité entre l’entreprise et son environnement direct…

Des postures et des partenaires différents

Au-delà de leurs périmètres différents, comment expliquer ce fonctionnement en silos ? Avant tout, les partenaires directs de ces deux directions ne sont pas les mêmes. Pour la RSE, les directions Marketing, Communication et Commerciale sont les interacteurs privilégiés. Il s’agit là d’entités peu tournées vers les ressources humaines de l’entreprise, et qui, parfois, travaillent davantage le discours que les actes. Pour la fonction RH, les partenaires sont avant tout la direction générale et les managers, sur les thématiques de paix sociale et de positionnement des bonnes personnes, aux bons endroits et aux bons moments, et d’autre part les salariés, pour des accompagnements sur mesure dans leur développement.

Les compétences ne sont pas les mêmes : analyse et design pour la RSE, écoute et réglementation pour les RH, de façon synthétique. Leur orientation varie également : la RSE est tournée vers la tête de l’entreprise, sa gouvernance, tandis que les RH davantage vers la base, les salariés.
Les deux directions ont donc historiquement construit des périmètres distincts, et notamment pour la RSE, issue des anciennes directions du développement durable, qui n’ont jamais inclus le volet humain.

La solution : une direction commune, a minima un programme intégré

Une alliance est avant tout nécessaire autour de la transformation de l’entreprise. Celle-ci est en train de basculer d’une transformation à dominante digitale à une transformation sociétale. Cette évolution crée un territoire commun, ouvre des chantiers à partager comme ceux de la raison d’être de l’entreprise, de l’impact sociétal, de nouvelle culture, de formation à la RSE des collaborateurs ou encore des actions à mener ensemble avec les fonctions de production de l’entreprise, pour y intégrer des façons d’exercer plus durables, en mobilisant et accompagnant les personnes qui les réalisent. Un tableau de bord et des indicateurs communs RH/RSE aideront aussi à travailler dans l’optique d’objectifs partagés. Enfin, identifier au sein de l’entreprise les nouveaux métiers (et les compétences futures) liés au développement durable est aussi une action RH contributive au renforcement de la RSE.

L’étape ultime serait la fusion des deux entités, vers une DRHSE, valorisant les richesses humaines et environnementales et développant avec davantage de force les impacts de l’entreprise.